A la question ‘êtes vous un ange ?’ - assurément, vous répondez non. Parce que vous êtes sensibles et habitués depuis l’enfance à vous fendre les genoux au moindre cailloux et vous vous doutez bien que pour voler, il vaut mieux réserver un billet d’avion, plutôt que d’essayer de sauter n’importe où.
Je me posais la question récemment en regardant le film de Moira Tierney, à savoir comment et avec quel œil, quel ange sur l’épaule, avait-elle su voler ce moment d’histoire, sans trembler, et dit quel saut vertigineux l’Amérique du Nord venait de faire, précipitant le monde dans un nouveau siècle.
Amérique du Nord. Tout tient dans ces 3 mots. A quel Nord appartient cette amérique-là ? Certainement pas à l’italien qui a eu le malheur de lui laisser son prénom, certainement pas aux 191 pays de l’ONU qui patientent pendant que l’Oncle Sam desserre ses mains sanglantes de la terre irakienne, certainement pas aux circuits rouillés et débiteurs en diable de la toute puissante Federal Reserve Bank. Seule Banque au monde à exiger et réussir à payer ses dettes en bons du trésor, qu’elle seule peut émettre. Certainement pas la Fed’, l’Amérique peut perdre ses guerres, y compris celle de la balance du commerce extérieur, mais pas son nord. Non, c’est le sien. L’Amérique du Nord, c’est le Nord de l’Amérique.
Qui sont donc tous ces petits électeurs du Nord, cachés sous les grands, qui ont fait basculer les derniers sudistes… Une bande de regards déserts, bercée par les pointes aiguës de la musique de Charlemagne Palestine. Nous voyons tous ces civils, familles ensemble, quitter pour de bon Manhattan, partir sur les routes, ni vaincus, ni faibles, simplement sans arme, aucune.
L’œil de Moira pose déjà les questions auxquelles les statistiques ne savent pas répondre - au bout de quel retard, de quelle crise et de quel détournement de morale publique, l’Amérique peut rêver qu’elle détient encore les rennes du monde ? Combien de temps va-t-on se croire le Nord de quelque chose ou de quelqu’un ? Quel mur, quel G20 tonitruant vont aujourd’hui encore, faire passer le marchand de sable ? God bless America, certainement. Amérique blessée, aussi.
O. Roy, 5 novembre 2008.