Petites peaux entrevues

par Rodolphe Olcèse

To Look For Real, Raphaël Soatto (2002)

My Memory (Part I), Raphaël Soatto (2001)

Phrases inspirées par
Hunting Visions, To Look For Real,
My Memory (Part I & II), Faire Corps
et L’autre naissance de Raphaël Soatto
 

ce sont peaux qui se retiennent dans la matière / peaux / minces / formes du monde / continuités se faisant / avec l’écorce terrestre / cette écorce / épaisse / et enfin la toile / et enfin les couches de peinture sur la toile sédimentées / c’est sur peau que l’image advient et revient sans cesse / et le monde est cet envers sans revers dont nous avons la garde / peaux / c’est le visage d’une jeune fille / de trois quart / tête légèrement inclinée / et s’il faut se tourner vers le ciel / pour que le monde / le monde sur nos peaux / à son tour se sédimente / c’est le visage cette peau / où l’image après avoir tremblé / légèrement / comme image se pose / pour se perdre à nouveau / enfouie / enfuie / chue / sous telle peau / peaux ce sont les visages / assemblés / agrémentés / qui se superposent sans pourtant se durcir / comme écorce terrestre / qui n’est fragile / jamais assez / cette superposition / c’est la peau qui est un lieu / tenant la profondeur / pour chose qui vient / à portée de main / comme un visage / à toutes caresses / exposé / rendu / peaux se posent / sur tous supports / et fenêtre et porte et couloir et cage d’escalier / tout écran par où voyage telle peau / et telle autre / tout un monde se presse / s’articule / entre rides si proches / si proches / approchées / jamais assez / comme cette main posée sur un sein / et nous sommes noirs de monde / et ce monde est à fleur de peau / il se presse, il se rencontre, entre rides / nous sommes noirs de monde / et c’est tout un monde que nos peaux affichent / un monde qui a besoin de toutes peaux pour trouver contenance / cette densité qu’elles proposent / les peaux / sans jamais trahir rien de leur fragilité / pellicule mince au delà de laquelle l’image perd les contours du corps / et dans le monde se dilate / et dans le monde disparait / finalement peaux / sans lesquelles nul édifice ne saurait tenir droit / ni aucun jour se lever / ni aucune nuit tomber / ni aucune lumière rejaillir / peaux où faire corps s’entreprend / et mémoire se creuse / aux heures inquiètes de voir comme elle remue / la nuit / davantage / davantage /
 

Rodolphe Olcèse

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