Burlesque or not burlesque, that is the question.

By Patrice Kirchhofer

Pour être, ou non BE- qui est la question:
Que ce soit ‘tis plus noble dans l’esprit de souffrir
les frondes et les flèches de la fortune outrageante
ou de prendre les armes contre une mer de troubles,
et en opposant mettre fin.

(Google Trad)

Burlesque est une plaisanterie d’origine italienne passée au français, et reparti faire un voyage à l’étranger. Du coup, le burlesque au sens américain (voire britannique) n’est pas tout à fait le terme qui se comprend encore ici, pour les rares fois où il est encore utilisé.

Le burlesque américain a quelque chose à voir avec le travestissement, descendant direct du Black Minstrel show, qui le caractérise – c’est même à ça qu’on le reconnaît, il reste néanmoins la parodie de quelque chose de sérieux, voire de dramatique. Amusant, bouffe, bouffonnerie, caricatural, clownesque, cocasse, comique, drolatique, farce, farfelu, funambulesque, grand-guignolesque, grotesque, loufoque, pantin, parodique, ridicule, risible, saugrenu, saynète, sketch, slapstick, tragi-comique, turlupin, ubuesque… funny, absurd… un genre cinématographique reposant sur le comique de la gestuelle et où le corps s’impose, locomotive du cinéma commercial ou d’Art et Essai classique. Jacques Tati ici s’en approche, Philippe Clair, Bertrand Blier. La liste s’allonge avec le mariage de Coluche et de Le Luron, le Père Noël considéré comme une ordure, la Grande vadrouille au Teurquiche Basse… Dans un second temps, au niveau supérieur, considérer John Wayne dans « Rio Bravo », Arnold Schwarzenegger dans Le Privé ou dans Terminator en corps glorieux, personnages burlesques, travestis comme sait si justement le relever Louis Skorecki, l’un des rares en France, qui se soit approché de la question, avec Joseph Morder parfois, Luc Moullet… tous trois situés à la marge extérieure de la méprisable orthodoxie expérimentale mékasienne qui circule hélas encore et toujours. Pour les références plus anciennes, voir bien sûr les deux monuments de Dali et Buñuel que sont Un Chien andalou (1929) et L’Âge d’or (1930).

La question du burlesque dans le cinéma expérimental n’est donc pas immédiate, d’autant qu’elle recoupe plusieurs choses distinctes. A priori on évoque en France le mariage de la carpe et du lapin. Je n’ai pas vu grande quantité de films expérimentaux, mais deux auteurs américains me viennent pourtant tout de suite à l’esprit : Robert Nelson et Stuart Sherman.

A priori seulement, il est possible qu’un regard extérieur au cinéma expérimental considère cette branche particulière dans sa totalité comme burlesque, incongrue, discordante, inadéquate, où le terme américain « slapstick » – qui le caractérise littéralement assez bien – prendrait dès lors son sens. Car si bon nombre de films expérimentaux deviennent ridicules avec l’usure du temps et peuvent prêter à rire, ils n’en deviennent pas pour autant burlesques.

La volonté de burlesque mal maîtrisé peut même tourner au ridicule, comme la mort par noyade des chevaliers teutoniques à la fin d’Alexandre Nevski. N’est pas burlesque qui veut, et Sergueï Eisenstein comme Dziga Vertov étaient bien incapables d’en jouer. Il était sans doute pour eux impossible de parodier la parodie permanente qu’ils avaient sous les yeux.

Robert Nelson est le seul a m’avoir tiré un éclat de rire en pleine projection de son film The Great blondino (1967), dont je n’ai en mémoire – mais pour toujours – et est-ce bien de lui, au fait ? - que les plans d’un type genre Norbert the Nark, l’agent de la DEA des Fabulous Freaks brothers (1968) de Gilbert Shelton, contemporain de la réalisation du film, ou d’un Blues Brothers (1980), ou d’un Men in Black (1997) pour les références plus récentes, en pleine filature de délinquants, et qu’un riff de musique de film noir de série B accompagne. Regardez Oh Dem Watermelons pour approcher un peu le « burlesque » dans son aspect expérimental.

Stuart Sherman faisait des performances dont il ne reste que très peu de captations, on est avec lui dans une dimension intermédiaire du genre, sur la crête entre les deux acceptions du terme burlesque – l’américaine et l’européenne latine – dans la dimension théâtrale pure. Dans le tragique.

L’escalier de la haine (1982) de Louis Skorecki est, entre autre, un film burlesque expérimental. Tiens ! J’ai vu un rat !

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