Édito

n°7 / juin 2009 : la fracture

La fracture peut être un moment où notre clairvoyance est comme amplifiée. Loin d’empêcher l’exercice de notre regard, elle peut permettre que ce à quoi nous étions aveugles nous crève enfin les yeux, invite notre attention à se porter au-delà du lieu où elle se trouve déjà.

C’est donc sous le titre d’un excès plutôt que d’une diminution que la fracture est abordée dans les pages qui suivent. Qu’elle soit l’objet d’un acte, filmé par accident, comme dans cette séquence tournée par Abraham Zapruder lors de l’assassinat de Kennedy, ou bien pure force mobilisatrice pour faire des films, comme c’est le cas dans les récents films de Frank Beauvais, la fracture donne toujours à voir, et nous fait aller chercher un peu plus loin dans la matière et le monde. C’est que finalement, toute fracture est une ouverture dans l’histoire, où un monde peut surgir (Bartlomiej Woznica et Natyelli Mora) et un art s’affirmer (Raphaël Soatto).

Pour autant, ce numéro d’étoilements ne méconnaît pas la douleur que toute fracture traîne avec elle, comme dans le cas du deuil (Reste-là de Frédéric Tachou) ou de l’internement psychiatrique (Les vagabonds des étoiles de Blaise Othnin-Girard). Il est beau de pouvoir se dire que cette douleur ne nous dédouane pas d’avoir à faire des films, mais nous y aide au contraire, en décuplant nos forces et notre détermination.

 

Rodolphe Olcèse

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