Lieu Commun

par Damien Marguet

Jʼaimerais revenir ici sur les raisons et les objectifs de lʼatelier “nouveaux dépôts” : pourquoi ce travail sur, et surtout à partir des films récemment entrés au catalogue ?

Parce que le Collectif reste fort de sa diversité. Il me semble important de profiter de cet immense réseau potentiel que représente le catalogue en multipliant les échanges entre acteurs internes et externes. Lʼatelier a pour but dʼintéresser les nouveaux coopérateurs à la structure et inversement. Cʼest, pour moi, la meilleure des “stratégies” de communication.

Parce que la notion de “jeune cinéma” doit être portée et défendue. Les films expérimentaux dʼaujourdʼhui ne sont pas ceux dʼhier, mais ils sʼen inspirent, les citent, les critiquent… Comment le savoir si personne ne sʼarrête sur ces travaux pour les réfléchir? Une création surexposée ne signifie pas nécessairement une création visible et lisible. La dématérialisation des œuvres, la multiplication des canaux de diffusion (lʼindividu créant et gérant désormais son propre canal) et lʼaccélération des flux dʼinformations, en constituant une sorte dʼhyper accès à la culture, rendent obsolète tout espace dédié au “voir ensemble” (on préférera mettre au musée et sur Internet, plutôt que dans une salle de cinéma, le film considéré comme œuvre dʼart). Ces évolutions empêchent, du même coup, la naissance de toute nouvelle “politique” de création. Sans réunion, pas de politique. Il reviendra bientôt à YouTube ou à Google dʼélire le meilleur film expérimental de lʼannée… Les trois mots qui définissent la coopérative nous incitent à résister : Collectif Jeune Cinéma. À travers cet atelier, il sʼagit de reprendre et de poursuivre un travail dʼexploration du domaine esthétique à partir des films, en respectant leur unicité et leur complexité.

Parce que le Collectif est un carrefour où se croisent et se découvrent depuis plus de trente ans des recherches très diverses. Il y a bien une défense et une résistance des images, qui échappent et débordent le verbe dans toutes ses formes (discours, analyses et catégorisations, communications). Elles donnent lieu à une forme toute particulière de rencontre, de personne à personne, silencieuse. Sans espace pour quʼelle se produise, le cinéaste nʼexiste pas. Pourquoi faire des films ? Pourquoi se réunir autour dʼeux ? Parce que nous en avons envie. Cet atelier veut préserver et entretenir ce désir, fondé sur une idée du cinéma comme lieu “en commun”.

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